vendredi 1 mai 2015

Résistant et déporté, Claude Bignon raconte l'horreur de la déportation .

Survivant et hanté, à Saint-Nazaire, Claude Bignon parle de Buchenwald et de la marche de la mort 






Claude Bignon a le souffle coupé pour toujours après avoir connu les atrocités des camps....
 (Interview et  article réalisés  par Kharinne Charov de Sud-ouest et publié il y a deux ans )

Comment vivre après avoir connu l'horreur ? 
Comment raconter l'indicible ? Comment rester en paix malgré un passage en enfer ? Claude Bignon, 90 ans,(92 actuellement ) ne répond pas à ces questions qui le hantent Simplement, sans haine, cet homme vit avec son lourd passé de déporté, à Saint-Nazaire-sur-Charente.
Gentil, sensible et intelligent, Claude Bignon n'est pas du genre à se plaindre. Sa lourde carcasse, qui a connu l'esclavage des camps et les coups des SS, le rappelle à l'ordre et refuse parfois de se lever, mais il avance. Pas très volubile en famille sur les années noires de ses vingt ans, il a appris à témoigner à l'extérieur, dans les écoles. Même si ça n'efface rien, même si ça fait mal, même si ça fait venir les larmes, il le faut « Pour que nul n'oublie l'histoire concentrationnaire. »
Matricule 30565
La pensée claire, il raconte. Les études d'ingénieur interrompues pour s'engager dans la Marine en 1940. Il a 17 ans et veut défendre la France. 1942, la flotte se saborde à Toulon, retour à Paris. En 1943, ce fils d'industriel dans le transport d'avion, qui a connu Mermoz et croisé Nungesser et Coli, entre en résistance, dans le Réseau des forces françaises combattantes pour six mois. Dénoncé, le jeune homme accompagné de son aîné Daniel, est arrêté par les Allemands dans un train qui le mène en mission à Bayonne. Il fêtera ses vingt ans au Fort du Hâ à Bordeaux. Après des jours d'« interrogatoires musclés », ce jeune homme est condamné à la déportation.

«Je ne me suis jamais reposé de cette aventure-là, ni remis de la mort de mon
frère qui me hante »

Voyage au bout de l'enfer, direction Dora, via Buchenwald. Tout a été dit sur les wagons à bestiaux, les chiens, la nuit, le froid, la soif, la faim, l'appel, les coups, et le reste qui n'a pas de mots. Il n'empêche, Claude Bignon devient le matricule 30565, frappé d'un triangle rouge : résistant terroriste.
Deux ans d'esclavage pour finir à 45 kilos, mais vivant. Ses compagnons ne sont plus, tel son frère battu à mort sous ses yeux, « et il ne fallait pas moufter. » Silence. « Mon commando comptait 384 membres,on a fini à... six. »Sa « chance » à Claude ? Il est costaud, il est sportif et il parle allemand.« En comprenant, c'était plus simple pour moi et pour aider les autres. » Il gardera des amitiés de camps jusqu'à faire d'un camarade le parrain de sa fille aînée.

Une vie oui, mais brisée
Pour clore le tableau à la libération des camps en 1945, le résistant est de la marche de la mort, avec étape à Ravensbruck : 250 km sans godasses sous les aboiements allemands, à bout de force pour un accueil « dégueulasse comme si on était des va-nu-pieds. » Peu à peu, il a raconté.« J'ai mis cinq ans à m'en remettre.» Mais au fond, pas vraiment car « j'y pense tous les jours,je passe des nuits blanches, on vit très durement après ». Même s'il y a eu sa tendre Ginette, aujourd'hui très malade ; trois enfants, les petits et arrière-petits enfants ; et une belle carrière dans le commerce industriel. Sans oublier les décorations (Légion d'honneur. Croix de guerre, médaille des combattants volontaires de la Résistance, des déporté-résistants et des Français libres).Rien n'y fait, c'est une vie brisée pour toujours. Alors depuis un an, le nonagénaire prend des cours de pilotage. « Quand je suis en haut, je rêve. Et il faut bien que j'aie la tête ailleurs. » Comme Mermoz, Nungesser et Coli.

 KHARINNECHAROV k.charav@sudouest.fr



Claude Bignon a témoigné lundi dernier, à l'occasion de la Journée Nationale de la Déportation, une intervention qui appelle respect et silence .Il sera fait Commandeur de la Légion d'Honneur, courant juin.
Le section FNCR de St. Froult est fière de le compter parmi ses membres.


Rochefort, Journée Nationale de la Déportation







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